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SUR LES RAILS DE

L'HISTOIRE

Rails & histoire, l'Association pour l'histoire des chemins de fer vous propose de plonger dans l'histoire des chemins de fer au travers de nombreux domaines (législatifs, techniques, commerciaux etc...).Ces thèmes et dossiers seront amenés à évoluer au fil du temps : regroupements ou nouvelles déclinaisons pour les premiers, enrichissements pour les seconds.

Il y a 130 ans naissait l’Orient-Express, trait d’union entre l’Europe et l’Asie

Après avoir obtenu, depuis 1872, de différentes administrations et compagnies ferroviaires européennes de pouvoir incorporer à certains de leurs trains de nuit, et sur quelques relations choisies, des voitures-lits de sa conception, Georges Nagelmackers décide en 1878 de promouvoir des trains entièrement composés de matériel appartenant à sa société, la Compagnie internationale des wagons-lits (CIWL). C’est à la création du premier de la série, le Train Express d’Orient, lancé en 1883 entre Paris et Constantinople, et dont on fête cette année le 130e anniversaire, que nous consacrons ces quelques pages.

Bruno Carrière

Luxe et ambiance feutrée. Extrait d’une publicité tirée d’un album-horaire publié par la CIWL en 1898. CIWL

Si, en 1884, les trains de luxe exclusivement composés de matériels CIWL se limitent encore à deux (Train Express d’Orient et Calais-Nice-Rome Express), ceux incorporant une ou deux voitures-lits de la compagnie sont bien plus nombreux. En pointillé, le futur itinéraire du Train Express d’Orient par Belgrade et Sofia. CIWL

À peine plus de cinq ans après l’incorporation, tant en France qu’à l’étranger, de voitures-lits de sa conception à certains de trains de nuit, G. Nagelmackers peut s’enorgueillir d’avoir convaincu les différentes administrations et compagnies ferroviaires concernées du bien-fondé de sa démarche, mieux, d’être devenu un partenaire incontournable. Cette certitude, il l’a fait partager à ses actionnaires en 1878 :


« Un grand nombre de nos traités ne sont pas de longue durée, mais la circulation de nos voitures a pris une si grande extension, leur utilité s’est si généralement imposée, nos relations internationales se sont développées à un tel point, qu’il est devenu difficile à une administration de chemins de fer de se passer de notre concours pour établir des services de sleeping-cars sur son réseau : elle s’isolerait complètement et devrait renoncer en quelque sorte à l’organisation de services internationaux pour lesquels les wagons-lits sont indispensables […].


« Il paraît du reste bien établi aujourd’hui qu’en Europe comme en Amérique les chemins de fer n’ont aucun intérêt à se charger eux-mêmes de l’exploitation des sleeping-cars qui exigent des soins administratifs si minutieux que l’entreprise privée, en en faisant une spécialité, est seule à même d’y satisfaire.


« L’usage des sleeping-cars dans les trains de nuit et sur les longs parcours s’imposant chaque jour davantage, les administrations les plus hostiles dans le principe à nos entreprises, reconnaissent aujourd’hui la nécessité d’employer nos voitures (1). »


Il est grand temps désormais pour lui de franchir un pas décisif avec la création de trains entièrement composés de matériels CIWL. L’Indépendance belge se fait l’écho de cette ambition dans un article reproduit par Le Figaro dans son édition du 23 septembre 1879. Le journal belge informe ses lecteurs du projet soumis au gouvernement belge par la CIWL : l’organisation, entre Ostende, Cologne, Berlin et la frontière russe, d’« un grand train express exclusivement composé de wagonslits et de wagons-salons » auquel serait adjoint, à certaines heures du jour, un wagon-restaurant. « Ce nouveau train, conclut L’Indépendance belge, serait le premier de ce genre introduit en Europe, et son succès paraît assuré quand on voit la faveur dont jouissent déjà les sleeping-cars isolés. » Et le chroniqueur du Figaro de commenter : « Quant on voit des progrès de ce genre se produire chez nos voisins, on se prend à regretter que nous soyons les derniers à marcher dans cette voie. Qu’on se hâte donc d’organiser un service semblable entre Paris et Nice, et le public reconnaissant remerciera certainement ceux qui en auront pris l’initiative. »


En 1880, G. Nagelmackers informe ses actionnaires de la création prochaine d’un premier train de ce type, étendu à la France : « Enfin, M. le Ministre des travaux publics de Belgique vient d’approuver dans son ensemble un projet de train de luxe à établir entre Ostende, Calais, Paris et les grandes villes du nord de l’Allemagne. Ce train qui serait exclusivement composé de voitures-lits, salon et restaurant, rencontrera également, croyons-nous, un accueil favorable auprès des administrations allemandes (2). » Prématurée, l’annonce n’est pas suivie d’effet.


Octobre 1882, un train d’essai entre Paris et Vienne


Notre homme ne baisse pas les bras pour autant. Le 4 octobre 1882, Le Figaro se fait l’écho de la décision de la CIWL d’organiser « un train spécial, à grande vitesse, entre Paris et Vienne ». Il précise les projets de la direction : « Créer un train de luxe entre Calais-Paris-Vienne, vers l’Orient d’une part, et vers la Russie de l’autre », train qui assurerait, à Paris, la correspondance de Londres, à Vienne, celles de Bucarest, Varsovie et l’Orient. Autre avantage : « Une certaine accélération de la vitesse et la suppression des arrêts pour les repos et pour la visite de douane permettront de faire en vingt-sept heures le trajet de Paris à Vienne. » Les négociations en cours étant sur le point d’aboutir, Le Figaro annonce l’événement pour le 10 octobre.


Le jour dit, un train composé de quatre voitures-lits (dont une à bogies, les autres à trois essieux), d’un wagon-restaurant à trois essieux et de deux fourgons à deux essieux avec vigie, quitte la gare de l’Est pour Vienne en début de soirée (l’heure de départ diverge selon les sources). Il franchit les 1 364 km qui séparent les deux capitales en 27 heures 53, à la vitesse commerciale de 48,7 km/h, soit près de six heures de moins que la relation la plus rapide de l’époque. Le poids total de la rame est de 103 tonnes et le nombre de lits disponibles de 58 (3).


Soyons honnête, ce voyage n’a pas fait les gros titres de la presse (française du moins), loin s’en faut. Le Figaro, contrairement à sa promesse d’apporter tout son soutien à l’opération, se contente de quelques lignes dans son édition du 13 octobre : « Vienne, 12 octobre – Le train éclair de Paris à Vienne a fait le trajet en vingt-huit heures, comme on l’avait annoncé. Les quarante voyageurs qui étaient dans le train ont trouvé les lits parfaits et la nourriture excellente. Succès complet pour le wagon-restaurant. L’accueil le plus sympathique a été fait aux voyageurs sur tout le parcours. » Le Gaulois est plus loquace, mais il faut attendre le 18 octobre, soit quatre jours après son retour en gare de l’Est, pour y lire la relation de F. Muller, son correspondant à bord du train. Hormis un remerciement appuyé à M. Lechat, secrétaire général de la CIWL, qui a fait « des prodiges en faveur des voyageurs », F. Muller ne donne aucun détail concret sur le voyage. Le Gaulois, toujours lui, se fend le 30 novembre d’un article signé du même qui, sous le titre « Les Trains Éclair », rappelle « les débuts difficiles » de la CIWL et, revenant sur le voyage de Paris à Vienne et retour, affirme « que l’organisation d’un ensemble de trains rapides sur les grandes lignes de l’Europe s’impose absolument ». Et d’ajouter : « La Compagnie des wagons-lits peut seule négocier pratiquement pour arriver au but désiré, car il est bien plus facile, pour les compagnies de chemins de fer de l’Europe, de s’entendre avec un tiers désintéressé, que de chercher un arrangement entre elle, cela ne fait pas de doute. C’est dire que dans l’avenir la compagnie des


Train Express d’Orient ou Orient-Express ? La dénomination officielle de l’Orient-Express est, jusqu’en 1891, « Train Express d’Orient », telle qu’elle apparaît sur le traité originel signé en 1883 entre la CIWL et les différents réseaux intéressés. C’est donc celle-ci que nous reprenons dans notre texte. Reste que les documents internes à la CIWL ont longtemps recouru à des appellations diverses : « train de l’Orient », « Express d’Orient »), « Train d’Orient », etc. La CIWL mentionne pour la première fois le nom d’« Orient-Express » en comité restreint à l’issue de son conseil d’administration du 8 septembre 1883 (procès-verbal), puis publiquement à l’occasion de l’assemblée ordinaire de ses actionnaires du 11 mars 1884 (rapport d’activité). La presse emploie indifféremment, et dès 1883, les différentes appellations, avec, toutefois, une prédilection pour le nom d’« Orient-Express ». Éditées en 1884, les premières étiquettes (16 x 11 cm) et affichettes (37 x 26 cm) consacrées à l’Orient-Express recourent aux deux appellations : « Grand Express d’Orient » et « Orient-Express ». Datée de 1888, la première affiche (102 x 71 cm) se limite à l’appellation « Orient Express » sleeping-cars sera le grand agent des relations internationales. » Voilà qui n’est pas sans rappeler le discours tenu par G. Nagelmackers à ses actionnaires en 1878. De l’art d’une communication efficace !

La plus ancienne annonce consacrée au Paris-Constantinople différencie encore le nom du train (Grand Express d’Orient) de la marque commerciale (Orient-Express). DR

Un mot ici sur l’expression « Train Éclair ». Contrairement à certaines assertions, elle n’est pas née de l’imagination de Georges Nagelmackers, mais d’un pari audacieux lancé outre-Atlantique six ans plus tôt, et dont Le Figaro s’est fait l’écho dans son édition du 10 juillet 1876. L’affaire a pour origine l’obligation faite à MM. Barrett et Palmer, les directeurs du théâtre Booth de New-York, de transporter leur troupe, sous contrat sur la côte Est jusqu’au 31 mai, jusqu’à San-Francisco pour une première représentation fixée au 5 juin. Ce trajet n’ayant jamais été fait en moins de sept jours, nos deux administrateurs imaginent de lancer à leurs frais un « Train Éclair » spécial « qui aurait le pas sur tous les autres, et traverserait le continent américain de mer à mer en quatre-vingt-huit heures ». Grâce à la complicité du New-York Herald et des chemins de fer qui « virent dans cette entreprise une source de triomphe pour leur service », le train, parti de Jersey-City (État de New-York) le lundi 1er juin à 1 h du matin, arrive à Oakland (San- Francisco) le dimanche 4 juin à 9 h 23 du matin. Les 1 120 lieues séparant les deux villes ont été couvertes en 83 heures et 53 minutes, soit en un peu plus de trois jours. Voyage non stop agrémenté seulement d’arrêts de quelques minutes pour changement de machines. Le train ne comportait que deux véhicules, le premier aménagé partie en fourgon postal partie en fumoir, le second partie en wagon-restaurant partie en wagon-lits. Outre les acteurs, quelques volontaires payants – « tous du sexe fort, car on a craint que les fatigues ne fussent trop redoutables pour la plus belle moitié du genre humain » – ont été du voyage (4). Par ricochet, la presse prend pour habitude, dans les années 1880-1890, de désigner sous le vocable de « train éclair » les trains accélérés mis en marche entre deux villes éloignées. Cette terminologie, parfois employée par les compagnies ferroviaires dans leurs discours publicitaires, n’est pas reprise par les documents officiels.


Curieusement, la question du train d’essai n’est évoquée par le conseil d’administration de la CIWL qu’après l’événement. La première mention n’en est faite que le 24 novembre 1882. Ce jour-là, le conseil « constate avec une vive satisfaction la complète réussite de l’essai du train éclair et le Directeur fait ressortir que tous les employés ont bien fait leur devoir ». Ce dernier précise, en outre, que « des négociations seront entamées de suite avec les Administrations intéressées pour obtenir l’organisation définitive du train de luxe sur la ligne Paris-Vienne ». Il parle d’un service bihebdomadaire. Dès lors, tout s’accélère. Le 18 décembre, le conseil évoque un service étendu à Constantinople et, le 8 janvier 1883, approuve la commande immédiate, pour « le train de l’Orient », de quatre wagons-restaurants, quatre wagons-lits et sept fourgons.


Mars 1883, le principe d’un Train Express d’Orient


Le 13 mars 1883, les actionnaires, réunis en Assemblée générale, sont informés à leur tour : « Enfin, la presse de tous les pays vous aura déjà appris que notre Compagnie va établir un grand train-éclair de Paris à la mer Noire, qui permettra de se rendre de Paris à Constantinople en 30 heures de moins qu’il n’en faut aujourd’hui. […] Enfin, et c’est là surtout que notre Compagnie peut trouver un champ d’exploitation sans limite, les Chemins de fer ont reconnu l’utilité de grands trains internationaux plus confortables et plus rapides, dont l’organisation n’est possible qu’avec le concours de notre Compagnie. Le premier de ces trains, construit et organisé par nous, sera l’Express d’Orient, dont nous venons de vous parler et qui, à partir du mois de juin prochain, circulera deux fois par semaine dans chaque sens entre Paris et Giurgewo (5). »


À cette date, les négociations entre les réseaux sont bien avancées. Au terme de plusieurs conférences (Vienne les 13 et 14 novembre 1882, Munich les 28 décembre et 30 janvier 1883), les représentants des différentes administrations et compagnies ferroviaires intéressées sont parvenus à la rédaction d’un « Traité pour l’organisation d’un train rapide particulier entre Paris-Giurgevo (Train Express d’Orient (6) ) ».


Ce traité, la direction de la Compagnie de l’Est l’a signé à Paris le 2 mars 1883. Elle a été suivie par : - la direction générale impériale des Chemins de fer d’Alsace-Lorraine (Strasbourg, 6 mars 1883) ;

- la direction générale des Chemins de fer de l’État du grand-duché de Bade (Karlsruhe, 31 mars 1883) ;

- la direction générale des Chemins de fer de l’État du royaume de Wurtemberg (Stuttgart, 3 avril 1883) ;

- la direction générale des Voies de communication du royaume de Bavière (Munich, 9 avril 1883)

- la direction J. R. pour l’exploitation des Chemins de fer de l’État, à Vienne (Vienne, 14 avril 1883) ;

- la Société austro-hongroise privilégiée des chemins de fer de l’État (ci-devant Société autrichienne J. R. P. des chemins de fer de l’État) (Vienne, 18 avril 1883) ;

- la direction générale royale des chemins de fer roumains (Bucarest, 2 mai 1883) ;

- la Société internationale des wagons-lits (Bruxelles, 15 mai 1883 (7) ).


Traité original associant la CIWL aux différents réseaux concernés pour la création du Train Express d’Orient. La date indiquée en haut à droite (22 mars 1883) est celle de sa prise en compte officielle par le conseil d’administration de la Compagnie de l’Est, les représentants de celle-ci ayant signé le document dès le 2 mars. CAH SNCF Le Mans

Le Train Express d’Orient dans sa composition définitive (octobre 1883). L’Illustration, 7 juin 1884.

Les risques du métier

Le Temps, 5 mars 1886.

Le Gaulois, 24 juin 1895.

Sur ce traité international viennent se greffer des conventions réglant plus précisément les rapports de la CIWL avec chacune des administrations ou compagnies intéressées. Il en est ainsi de la Compagnie de l’Est, dont les administrateurs approuvent le 17 mai 1883 la convention à passer « pour la mise en circulation, en ce qui concerne le parcours de Paris à Avricourt, des trains rapides dits : Trains express d’Orient ».


Un mot ici de la teneur du traité international portant la création du Train Express d’Orient.


La CIWL s’engage à fournir gratuitement le matériel nécessaire (wagons-lits, wagons-restaurants, wagons-salons et fourgons à bagages) à l’organisation d’un service régulier de trains rapides entre, d’une part, Paris et Giurgevo, de l’autre, Paris et Kustendje (l’actuel port roumain de Constantza, sur la Mer Noire). Ces trains, auxquels est donné le nom de « Trains Express d’Orient », devront être mis en circulation, dans les deux sens, une ou deux fois par semaine, voire plus souvent selon les besoins éventuels. Les jours de départ des trains de Paris feront l’objet d’une entente ultérieure, mais il y aura lieu, toutefois, de faire en sorte que le premier train parti de Paris puisse être utilisé comme train de retour de Giurgevo. Chaque rame, composée exclusivement de matériel CIWL, comprendra deux fourgons, un wagon-salon-restaurant et au moins deux wagons-lits. Elle ne pourra avoir une charge supérieure à 100 tonnes sur le parcours de Paris à Vienne, de 80 tonnes au-delà. La CIWL est libre de faire circuler le wagon-restaurant de bout en bout ou sur les seules sections traversées de jour. Les wagons « devront être établis d’après les systèmes reconnus les meilleurs, et leur intérieur devra satisfaire à toutes les exigences au point de vue de la commodité, de l’espace et du confort ». Ils seront mis en communication entre eux au moyen de « plates-formes-passerelles », éclairés au gaz ou à la lumière électrique et chauffés au moyen de conduites d’eau chaude. Ils devront être pourvus, en outre, de freins à main et de freins pneumatiques des systèmes Hardy (à vide) ou Westinghouse (à air comprimé) (8), ainsi que d’un appareil permettant aux voyageurs, en cas de danger, de « se mettre en communication avec le mécanicien afin de faire arrêter le train dans le plus court délai ».


La CIWL s’engage, par ailleurs, à tenir « en disponibilité » au moins une voiture de réserve dans chacune des gares de Paris, Vienne et Bucarest. La traction échoit aux administrations contractantes.


La CIWL prend à sa charge tous les frais d’entretien des voitures, tant des parties extérieures que des parties intérieures, excepté les avaries résultant de l’état défectueux des locomotives ou de la voie, ou de la faute d’un agent des administrations contractantes. Elle se charge également, à ses frais, du nettoyage de l’intérieur des voitures, de l’éclairage et du chauffage. Par contre, le graissage des boîtes d’essieux et la propreté des caisses incombent aux administrations contractantes.


Chaque voyageur est tenu de se munir d’un billet de 1re classe auquel s’ajoute un supplément fixe correspondant à 20 % du prix du dit billet. Tout voyageur trouvé sans billet valable sera condamné, en sus du prix du billet, à une amende forfaitaire de 100 francs. La CIWL ne peut exiger d’autre supplément que ceux établis pour les repas et les boissons, dont le tarif sera affiché à l’intérieur du wagon-restaurant. Aucun supplément ne peut non plus être réclamé pour le transport des bagages.


Les agents affectés au service intérieur des voitures, recrutés et rémunérés par la CIWL, sont tenus d’obéir aux chefs de gare, chefs de train et contrôleurs, lesquels leur viendront en aide si nécessaire. Ceux-ci ont libre accès aux voitures pour procéder au contrôle des billets, avec pour consigne, cependant, « de troubler le moins possible le repos des voyageurs ».


La CIWL prend l’engagement, moyennant rémunération, de transporter le courrier « en tant que cela pourra se faire sans compromettre le but des trains et sans augmenter le nombre des wagons, ni surcharger les trains ».


L’idée prévaut que la Compagnie des chemins de fer de l’Est aurait joué un rôle prépondérant dans la conclusion de cette affaire, que c’est sous son égide que se seraient déroulées les négociations et qu’elle aurait servi de porte-parole auprès de la CIWL (9). Rien dans les archives de cette compagnie, ni dans celles de la CIWL, ne permet de confirmer cette supposition. L’examen des procès-verbaux du conseil d’administration de la Compagnie de l’Est révèle que ses membres ne se sont penchés sur la question que tardivement, le 25 janvier 1883, prenant ce jour-là connaissance de la teneur des conférences et du projet du traité en gestation. Ils n’y reviendront que le 22 mars pour approuver définitivement le traité signé le 2.


C’est à la Direction générale impériale des Chemins de fer d’Alsace-Lorraine (Kaiserliche Generaldirektion der Eisenbahnen in Elsaß- Lothringen, EL) qu’incombe le rôle de « gérant » du Train Express d’Orient, et non à la Compagnie de l’Est qui n’héritera de cette charge qu’au lendemain de la Première Guerre mondiale. Toutes les questions touchant au nouveau service sont centralisées par la direction générale des Chemins de fer d’Alsace-Lorraine, qu’il s’agisse, par exemple, de modifier la fréquence, l’itinéraire ou l’horaire des trains, ou encore, plus prosaïquement, d’approuver les tarifs des repas et boissons servis à bord. La Compagnie ne l’Est ne jouit que d’une seule prérogative (qu’elle partage avec la Direction générale impériale des Chemins de fer d’Alsace- Lorraine), celle de dispenser l’autorisation de mise en circulation des matériels CIWL après leur examen par ses ingénieurs.


Juin 1883, période de rodage pour l’Orient-Express


Le 2 juin, la Compagnie de l’Est émet l’ordre de service (n° 75) portant la « Régularisation des Trains Express G et H, entre Paris et Avricourtfrontière, deux fois par semaine, pour le service des Trains Express d’Orient (Société Intale des Wagons-Lits) ». En clair, la transformation en marches régulières des marches facultatives prévues au service des trains du 1er juin, à savoir, pour le train G, de Paris à Giurgewo-Constantinople, les mardis et vendredis à partir du 5 juin ; le train H, de Giurgewo-Constantinople à Paris, les mercredis et dimanches à partir du 10 juin.


Le grand public apprend la création du Train Express d’Orient la veille de son premier départ, fixé au mardi 5 juin. L’annonce en est faite par Le Figaro dans ses éditions du 4 et du 5 : « Mardi prochain, 5 juin, aura lieu l’ouverture d’un nouveau service organisé par la Compagnie internationale des wagons-lits (sleeping-cars) : l’Orient- Express, train de luxe de Paris à Constantinople, trajet en 82 heures.


« Les départs auront lieu de Paris (Est) les mardis et vendredis, à 7 h 30 du soir. Les départs de Constantinople, les dimanches et jeudis, à midi 30 ; rejoignant le train de luxe à Guirgevo (Roumanie) les lundis et vendredis. « Ce train est exclusivement composé des wagonslits, salons et restaurant de la Compagnie des Sleeping-cars.


« Cette Compagnie a obtenu de toutes les administrations des douanes la faveur que les bagages de ses voyageurs fussent visités en cours de route ; c’està- dire sans aucune descente du train ; ce qui, joint à l’organisation du restaurant (où seront servis, aux prix de 4 à 6 francs, des déjeuners et dîners spécialement soignés), a permis de réduire de 30 heures la durée actuelle du voyage de Paris à Constantinople.


« Tous ces avantages sont assurés aux touristes moyennant un supplément de 20 % sur le prix des places ordinaires de chemin de fer.


« L’Express d’Orient acceptera les voyageurs à destination des principales villes intermédiaires des parcours, telles que Vienne ou Bucharest, par exemple.


« Les voyageurs d’Angleterre, amenés de Calais directement à Châlons-sur-Marne, y rejoindront l’Express d’Orient.


« Ceux de Paris sont priés pour tous renseignement, places à retenir d’avance, bagages à enregistrer, etc., de s’adresser à l’agence de la Compagnie (2, rue Scribe). »


Tout comme pour le Train Éclair de 1882, l’enthousiasme de la presse est très mesuré. Pas de relation grandiloquente, mais de rares communiqués manifestement rédigés par la CIWL, comme celui publié par Le Figaro le 7 juin 1883 sous la têtière « Renseignements » : « Le 1er départ du train de luxe de la Cie des wagons-lits, de Paris à Constantinople, a eu lieu le 5 juin, à 7 h 30, en présence de plusieurs fonctionnaires supérieurs de la Cie de l’Est, et du nombreux personnel de celle des Sleeping-cars, et s’est accompli dans un ordre parfait. Les regards étaient particulièrement attirés par le brillant uniforme des chefs de train des wagons-lits, imité de celui de la staatsbahn autrichienne. Non seulement les voitures étaient complètement occupées, mais on a dû refuser un certain nombre de voyageurs au départ. Un quart d’heure avant celui-ci, le département des Postes et Télégraphes, a fait déposer dans le fourgon de l’Orient-Express, les postes françaises et anglaises à destination de Constantinople. »


Le Figaro et Le Gaulois sont les deux seuls quotidiens consultés à évoquer le Train Express d’Orient, avec toujours cette impression qu’ils sont commandités par la CIWL. L’encart publié le 12 juin par Le Gaulois rappelle ainsi que les prestations rattachées à l’Orient-Express commencent avant même le départ : « Nous signalons particulièrement le confort du wagon-restaurant faisant partie du train et l’excellence des repas. Les voyageurs en arrivant à la gare, une demi-heure avant le départ du train, se mettent à table, sans s’occuper des places qui leur sont assignées, ni de leurs bagages. M. Finzi, chef de l’agence de Paris de la Compagnie, pense à tout ; à leur installation, à l’enlèvement à domicile de leurs bagages, à l’enregistrement et aux formalités de douane à toutes les frontières. Nous ne pouvons que féliciter M. Nagelmackers, directeur-administrateur, et M. Lechat, secrétaire général, pour avoir fait disparaître ce que le progrès n’avait pas encore pu vaincre dans les voyages : la fatigue. »


Les quelques informations qui filtrent les mois suivants mettent en exergue le succès rencontré par le nouveau service. Le Figaro du 23 juillet, relayant Le Gaulois du 22, s’y emploie : « Jamais le mouvement des voyageurs n’a été tel qu’en ce moment. Tous les Orient-Express organisés par la Compagnie internationale des wagons-lits entre Paris et Giurgevo sont partis et arrivés pleins la semaine dernière, et des vingt-huit places mises à la disposition du public pour demain mardi, il n’en reste pas une. »


Le 3 août, la CIWL remonte au créneau. Ce jour-là, Le Figaro et Le Gaulois publient le même communiqué : « Tous les départs de Paris, et la plupart des retours de l’Orient depuis quinze jours, ont eu lieu sans qu’il restât une place libre dans les voitures. À la demande unanime des ambassades, administrations postales, des banques et du haut commerce de Constantinople, les jours des départs de l’Orient-Express vont être prochainement changés, en vue de faciliter l’expédition des correspondances, le raccordement de celles du Levant, etc. Une conférence, convoquée tout récemment à la demande de la Compagnie des Wagons-Lits, a résolu ces questions et a réduit encore de plus de deux heures la durée du voyage de Constantinople à Paris. Le nouvel horaire sera prochainement publié. La Compagnie des Wagons-Lits ne voulant pas s’arrêter dans cette voie des Trains-Hôtels rapides, qui est celle de l’avenir, étudie actuellement, en vue de l’hiver prochain, le projet d’un Russian-Express, de Londres et Paris à Saint- Pétersbourg, par Berlin. »


Depuis cette même époque, Le Figaro, dans sa rubrique mondaine « Déplacements », rend régulièrement compte des personnalités ayant emprunté le Train Express d’Orient. Tel est le cas, notamment, le 3 août, du baron Edmond de Rothschild.


Le 23 août, les administrateurs de la Compagnie de l’Est approuvent la transformation, à la gare de La Villette, de la halle de transbordement des cotons, laissée sans emploi, « en une remise pour les voitures du train express d’Orient ». Ils ouvrent à cet effet un crédit de 21 000 F, les travaux étant adjugés en septembre à un certain Bourlier.


Octobre 1883, le train inaugural


Le 3 octobre 1883, Le Figaro et Le Gaulois annonce l’organisation d’un « train spécial d’inauguration » entre Paris (départ le 4) et Constantinople (arrivée le 8). Exclusivement réservé aux invités de la compagnie, ce voyage a pour objet de célébrer la mise en service du « nouveau matériel » ou « matériel définitif » du Train Express d’Orient. En effet, le matériel utilisé depuis le 5 juin, quoique limité à cinq véhicules à essieux (deux voitures-lits et une voiture-restaurant encadrées par deux fourgons), était le même que celui qui était entré dans la composition du Train-Éclair de luxe, un retard dans la construction n’ayant pas permis l’introduction à cette date des voitures spécialement commandées à cet effet. La nouvelle rame se compose comme suit : un fourgon de tête à deux essieux avec vigie pour les bagages, deux voitures-lits à bogies pouvant accueillir 40 voyageurs, une voiture-restaurant- salon à bogies offrant 36 places (dont 12 places pour le salon-fumoir), et un fourgon de queue à trois essieux réservé aux provisions et comportant une cabine de douche.


Les réseaux ferroviaires des Balkans, encore en chantier, n’étant pas en mesure d’assurer le passage du train à destination de Constantinople, le convoi, après avoir dépassé Bucarest, s’arrête à Giurgewo (actuelle Giurgiu), petit port roumain sur le Danube. Un bac à vapeur assure alors la traversée du fleuve pour rejoindre la rive bulgare à Roustchouk (Roussé). Un autre train se charge ensuite, en sept heures, de conduire les voyageurs à Varna au bord de la mer Noire. Ils embarquent sur un paquebot du Lloyd autrichien qui, après une quinzaine d’heures, arrive à Constantinople. Bien qu’exigeant un peu plus de 81 heures, le trajet économise plus de 30 heures sur ce qui se faisait de mieux jusqu’alors.


Le départ du train inaugural ne fait pas non plus la une des journaux. Seul Le Gaulois revient sur l’événement dans un court papier publié dans son édition du 5 octobre, sobrement titré « Le départ de l’Orient-Express » : « L’Orient-Express est parti, hier soir, à sept heures trente. Un grand nombre d’amis étaient venus accompagner les voyageurs jusque sur les quais de la gare de l’Est. Disons tout de suite que M. Cochery, ministre des Postes et Télégraphes, s’était fait excuser auprès de l’administration, sous prétexte qu’il doit assister plus tôt qu’il ne pensait à la réunion de la commission du budget. Nous croyons, nous, que M. Cochery a craint qu’on ne fît quelques critiques au sujet de ce voyage de plaisir dans un moment où la présence des ministres à Paris est plus que nécessaire (10) ». G. Cochery n’est pas le seul à faire faux bond. Bien qu’annoncés, Noblemaire, directeur du PLM, et Sevène, directeur du PO, manquent à l’appel. Les grands réseaux sont finalement représentés : pour l’Est, par Charles Berthier, administrateur ; pour le Nord, par Delebecque, ingénieur en chef du Matériel et de la Traction ; pour le PLM, par Henri Amiot, ingénieur en chef ; pour le PO, par Léon Courras, secrétaire général ; pour l’Ouest enfin, par Delaître, ingénieur (fils du directeur). Ils sont accompagnés de plusieurs délégués étrangers, dont Missak-Effendi, premier secrétaire de l’ambassade ottomane à Paris, et Xavier Olin, ministre belge des Travaux publics, et de plusieurs cadres de la CIWL conduits par G. Nagelmackers.


Les risques du voyage ont incité la CIWL à n’inviter que 24 personnes, qui ont été discrètement priées de se munir d’un révolver au cas où, et à exclure toute présence féminine (11). Autre précaution, la mobilisation du médecin de la compagnie, Harzé. En bon communicant, G. Nagelmackers sait qu’il lui faut à tout prix emporter l’adhésion de la presse, d’où de nombreux journalistes, français et étrangers, parmi les élus. Les plus communément cités sont Henri de Blowitz du Times, Georges Boyer du Figaro, Edmond About du XIXe Siècle, et Jules Tréfeu du Gaulois. Tous ont laissé une relation de leur périple jusqu’à Istanbul (12).


C’est précisément à Blowitz que l’on doit la seule évocation de l’atmosphère qui règne en gare ce soir-là. « Au moment où j’arrive à la gare de l’Est, je la trouve brillamment illuminée. L’administration du chemin de fer a entouré, elle aussi, le départ du premier train de l’organisation définitive, de tout l’éclat possible. Les lumières électriques se répandent à profusion à travers la gare. Les employés, dès l’entrée, vous indiquent la voie latérale sur laquelle l’Orient-express [sic] est rangé. Bon nombre de personnes sont venues saluer les partants, et, comme la plupart d’entre ceux-ci font pour la première fois le voyage de Constantinople, ce n’est pas sans un peu d’émotion, mêlée à beaucoup de joie, que l’on se sépare. Le train lui-même a un aspect éclatant. […] Il occupe en tout une longueur de soixantequinze mètres. […] Chacun des invités a reçu en entrant un petit carton plié en deux qui contient à l’intérieur une carte photographiée en réduction, la carte des lignes de chemin de fer desservies en 1883 par la Compagnie internationale des wagons-lits. Sur un des côtés extérieurs, l’horaire des stations à parcourir jusqu’à Constantinople, avec les minutes d’arrêt ; et sur la première page, au-dessous du titre : « Orient-express », ces mots : « M. X… est prié de prendre place dans la voiture 151, lit n° 3. » Chacun cherche son lit, dépose ses menus bagages, et se précipite vers la fenêtre du corridor qui donne sur le quai du départ pour saluer ceux qui restent, et serrer une dernière fois les mains émues qui se tendent vers lui. […] Au moment où ce signal va retentir [le sifflet de la locomotive], l’Orient-express offre du dehors d’où je le regarde pendant un instant avant de m’élancer sur le marchepied, un tableau bien moderne et bien intéressant. Quarante bras se tendent d’un côté vers cent mains qui les étreignent ; les conducteurs des wagons-lits, avec leur costume marron auquel les vives lumières donnent des reflets rougeâtres, s’agitent, des paquets sur les épaules et des sacs à la main, dans les compartiments où ils essayent de les caser, marchant de côté, sur la pointe des pieds, dans l’espace étroit que leur laissent les voyageurs entassés dans les corridors et collés contre les ouvertures des croisées. Quelques mouchoirs s’agitent, quelques chapeaux se soulèvent ; les employés du chemin de fer font reculer les spectateurs, et séparent, avec l’inflexibilité du destin, les mains qui se retiennent. En avant des deux wagons et du fourgon, les rideaux coquettement relevés, le wagon-restaurant jette un éclat extraordinaire sur la scène tout entière. Les grands becs de gaz comprimé éclairent une véritable salle de festin. Toutes les tables du restaurant, deux par deux, se faisant face, celles de quatre couverts à droite, celles de deux couverts à gauche, sur sept rangées, sont dressées d’une façon somptueuse. La blancheur des nappes et des serviettes fantastiques pliées avec un art coquet par les sommeliers du restaurant ; le scintillement transparent des cristaux ; les rubis du vin rouge ; les topazes du vin blanc ; le pur cristal de l’eau à travers les carafes, et les casques argentés des bouteilles de Champagne, jettent une note éblouissante sur la foule au dehors et au-dedans, et donnent comme un démenti vivant à la tristesse des physionomies et aux regrets invraisemblables des partants. »


Le voyage inaugural du mois d’octobre 1883 a fait l’objet de récits soit édités (H. de Blowitz), soit publiés dans la presse (par Le Figaro pour G. Boyer, par Le Gaulois pour J. Tréfeu).

Parti de Paris le jeudi 4 au soir (19 h 30), le Train Express d’Orient relie Giurgewo le dimanche 7 au matin (6 h), avec pour principales étapes Nancy, Deutsch-Avricourt, Strasbourg, Karlsruhe, Stuttgart, Augsbourg, Munich, Vienne, Budapest et Bucarest. Soit en un peu plus de 82 heures, durée conforme donc au projet initial. Si l’on excepte un léger incident dans la journée du vendredi 5 – « La roue du restaurant ayant chauffé, nous avons été obligés de l’abandonner un peu brusquement, dans la gare d’Augsbourg » (de Blowitz) –, incident vite résolu (un wagon-restaurant de réserve est attelé à Munich), le voyage se poursuit sans encombre. Non sans quelques temps forts : au-delà de Budapest, l’accueil à bord d’un orchestre tzigane entre les gares de Szegedine et de Temesvar ; à Bucarest, l’observation d’un arrêt prolongé afin de répondre à l’invitation des souverains roumains en villégiature à Sinaïa, dans leur toute nouvelle résidence d’été ; à Giurgewo, la traversée du Danube en bac à vapeur pour rejoindre Routschouk – « un trou sans nom, un ramassis de vieilles baraques » (J. Tréfeu) ; de là, l’emprunt des rail des Chemins de fer Orientaux (13) jusqu’à Varna, sur la rive de la mer Noire ; enfin, la traversée de nuit par bateau (l’Espero, bâtiment du Lloyd autrichien) jusqu’à Constantinople.


Les voyageurs regagnent Paris le 16 octobre.

Intérieur de la voiture-restaurant du Grand Express d’Orient. Tables pour quatre convives à droite, pour deux à gauche. La Nature, 7 juin 1884, CNUM.

Outre un confort inusité (et parfois contesté), le Train Express d’Orient apporte à ses hôtes bien d’autres avantages résumés en 1884 par Al. Laplaiche, commissaire de surveillance administrative des chemins de fer et collaborateur du journal La Nature : « L’Orient-express procure aux voyageurs une économie considérable sur la durée des trajets. Cette économie est due à diverses causes, en dehors de la vitesse de pleine marche du train : d’abord les arrêts sont aussi peu nombreux que possible, et leur durée est réduite au temps strictement nécessaire pour prendre de l’eau et du combustible, les voyageurs n’ayant pas besoin de s’arrêter dans les buffets, et trouvant leurs repas tout préparés et somptueusement servis dans le dining-car (14); ensuite les voyageurs n’ont pas à s’arrêter plus ou moins longtemps aux diverses frontières, pour subir, à tout heure du jour ou de la nuit, dans des salles plus ou moins bien chauffées, l’ennuyeuse visite de la douane : cette visite s’effectue pendant la marche du train, en vertu d’une entente entre la Compagnie internationale des wagons-lits et les différentes puissances traversées, et les douaniers montés dans l’Orient-express à la frontière, sont ramenés à leur poste par un train en sens contraire ; enfin, dernier élément de rapidité, les voyageurs ne sont pas astreints à changer de train dans les gares têtes de lignes, telles que Avricourt, Vienne, Bucarest, etc., et à y séjourner plusieurs heures en attendant un nouveau train, correspondant plus ou moins exactement avec celui qui les a amenés. (15) »


Précisons ici que les hôtes du Train Express d’Orient bénéficie du privilège, une fois atteint la gare frontière allemande de Deutsch-Avricourt, de ne pas quitter leurs voitures. Cela, contrairement aux voyageurs des autres trains qui, en raison du sens de circulation inversé (à gauche en France, à droite en Allemagne), sont invités à descendre et à rejoindre à pied les convois en partance pour Strasbourg et ses au-delàs, non sans s’être pliés auparavant aux longs et pénibles contrôles douaniers opérés sur place.


Un autre passe-droit leur est accordé en 1888 au moment de « l’affaire des passeports ». Le 30 mai de cette année, les Allemands exigent en effet de toutes les personnes qui entrent en Alsace- Lorraine via la frontière française un passeport visé par l’ambassade d’Allemagne à Paris. Une obligation très mal accueillie dont les voyageurs du Train Express d’Orient sont exemptés quelques jours plus tard conformément à l’avis officiel reçu par la CIWL, avis reproduit par Le Figaro dans son édition du 3 juin : « Les voyageurs par Orient- Express, munis de billets directs de Paris jusqu’à destination au moins de Munich, sont dispensés du passeport. Le train sera accompagné par un commissaire spécial, aux frais de la Compagnie. » Cette dispense, poursuit Le Figaro, constitue pour la CIWL « un nouveau succès puisqu’il en va résulter, au profit du public, un avantage considérable », ainsi résumé : « Ayant depuis longtemps déjà déterminé les douanes de la plupart des pays, et notamment celles de l’empire allemand, à autoriser la visite des bagages, en cours de route, par des agents accompagnant le train entre deux gares, la Compagnie a porté ses efforts vers l’obtention d’une mesure analogue, c’est-à-dire la dispense du passeport en faveur de ses voyageurs traversant l’Alsace-Lorraine, et ce, moyennant l’accompagnement du train par un agent gouvernemental, dont le déplacement, comme celui des douaniers, est payé par elle. » Entre-temps, et pour tourner la formalité du passeport, la Compagnie de l’Est organise de nouveaux services par trains rapides entre l’Angleterre, la France, la Suisse, l’Autriche-Hongrie et l’Orient par la voie de Belfort, Delle, Bâle, Zurich et l’Arlberg. Ces services comprennent des wagons-lits directs entre Paris et Vienne, en correspondance avec le Train Express d’Orient pour les au-delàs. L’obligation du passeport est supprimée le 1er octobre 1891, excepté pour les militaires en activité, les anciens officiers et les Alsaciens qui se sont soustraits au service militaire par l’émigration.


Traverser plusieurs pays d’Europe implique certains accommodements. Envoyé spécial du Gaulois, Jules Tréfeu, qui s’était déjà étonné de la multiplicité des systèmes de freinage, n’était pas au bout de ses surprises : « Autre particularité curieuse : le chef de train qui est avec nous depuis Avricourt [point frontière entre la France et l’Alsace-Lorraine], et qui va nous accompagner jusqu’à Simbach [point frontière entre la Bavière et l’Autriche], est obligé de revêtir l’uniforme des chemins de fer des États qu’il traverse ; ainsi, tout en gardant le même pantalon bleu foncé, il enlève entre Strasbourg et Kehl sa tunique et sa casquette noires à passements rouges, pour en revêtir d’autres de couleurs différentes ; dans le Wurtemberg, il nous apparaîtra avec une casquette et une tunique verte ; et en Bavière, sa coiffure et son vêtement prendront la couleur bleu clair. »


Un succès mitigé


En interne, la CIWL ne parle que très peu de son premier train international. Lors de sa réunion du 8 septembre 1883, son conseil d’administration se contente d’évoquer les « superbes » résultats du Train Express d’Orient. Une satisfaction renouvelée tout aussi brièvement le 12 novembre : « … l’Orient Express continue de donner des recettes magnifiques. » Mais changement de ton le 17 décembre : « Le directeur rend compte du succès exceptionnel du «Nice et Rome Express et, par contre, de l’abaissement des recettes de l’Orient-Express (que la saison faisait du reste prévoir). Il se propose de demander à la Cie de l’Est un allègement des charges qu’elle nous a imposées. » Le 26 janvier 1884, il parle d’une perte de 2 500 F et le 1er mars d’une aggravation de la situation : « Il [le directeur] constate que les résultats de l’Exploitation en décembre n’ont pas été très satisfaisants : les recettes du Train d’Orient surtout sont devenues très faibles et les insuffisances à payer à la Cie de l’Est ont atteint un tel chiffre que les opérations de cet Express, pendant le mois de décembre, se soldent par une perte de frs 5 554. (16) »


À l’occasion de l’Assemblée ordinaire des actionnaires du 11 mars 1884, le ton se veut plus rassurant : « Sous la rubrique “Bénéfices divers” est venu s’ajouter cette année [bilan de 1883] un élément qui deviendra très important : c’est le subside que les Administrations des divers pays traversés par “l’Orient Express” nous paient pour le transport des dépêches postales dans nos fourgons. » Il n’est pas interdit de penser que c’est le transport du courrier qui a permis au Train Express d’Orient de survivre. En effet, en contrepartie du transport gratuit des dépêches françaises, la CIWL a obtenu de l’administration des Postes l’abandon de la totalité des droits de transit sur le territoire national payés par les offices étrangers (17). En 1883, donc, ces droits se sont élevés à 4 000 F (pour 411 kg de courrier transportés). Des contrats équivalents ont été passés avec les différents réseaux traversés par le Train Express d’Orient. Ceux-ci ont rapporté à la CIWL, toujours en 1883, la somme de 23 000 F (pour 2 096 kg de courrier transportés) soit, en intégrant le parcours français, 27 000 F (pour 2 507 kg de courrier transportés).


« Alors commence une scène indescriptible »


Le Train Express d’Orient, c’est aussi l’assurance d’une promiscuité parfois dérangeante, loin de l’ambiance feutrée trop souvent magnifiée.


« L’Orient-Express s’ébranle. À peine a-t-il dépassé le premier tunnel que de stridents appels de cloche retentissent dans les couloirs. C’est le dîner qu’ils annoncent.


« On se presse, on se bouscule autour de l’étroite issue. Les tables sont prises d’assaut ; on s’arrache les couverts, les verres et les assiettes ; enfin on se tasse tant bien que mal. Mais, comme tout le monde se connaît, qu’il n’y a pas d’intrus, rien que des camarades, il n’y a pas de couples fâcheusement assortis.


« Alors commence une scène indescriptible, quelque chose d’inouï, de fou, d’inénarrable. Le bruit des voix qui s’appellent et se répondent domine le bruit du train roulant à toute vitesse, comme le tumulte des flots en fureur domine celui de l’ouragan déchaîné. Vues de la route, ces six voitures dans leur élan vertigineux, avec ces ombres collées aux vitres, sous l’étincellement des flammes vacillantes, devaient donner l’illusion de quelque chevauchée fantastique. [Suit une joute chantée d’où naît « une rhapsodie cocasse »]. «


Des hourrahs frénétiques saluent le dernier couplet. Puis, Clairin, en arabe, entonne le chant du Muezzin. C’est le couvre-feu. La fête finit dans les flots de champagne.


« On sort à la queue leu leu pour regagner chacun son lit. Nous saluons au passage un couple qui n’est pas de la bande – attablé dans un coin du diningroom, et qui ne se plaindra pas de ne pas en avoir eu pour son argent.


« – Ils sont gais, ces jeunes gens, dit tous bas la dame au monsieur, et très distingués !


« – Oui, répond le monsieur à la dame, très distingués, mais un peu communs ! »


Émile Blavet, « À travers la Hongrie. De Paris à Vienne », La Vie parisienne, [Paris], P. Ollendorff, 1886, p. 191-192.


« Et pourtant, il faut bien l’avouer, le confortable n’y est pas »


En écho aux premières circulations du Train Express d’Orient, chacun, à l’exemple des correspondants des grands journaux quotidiens de l’époque, retour d’ascenseur oblige, s’est fait un devoir d’encenser le confort des matériels de la CIWL. Or il s’est trouvé quelques voix discordantes pour déranger cette belle unanimité.

« L’Orient-Express est une véritable maison roulante, une habitation complète, pourvue de tous les détails, de toutes les exigences de la vie sociale ; on y trouve chambres à coucher, à deux et à quatre lits, avec table, fenêtre, glace, divans ; cabinets de toilette et autres, avec réservoir d’eau, galeries de promenades, ou corridors, sur lesquels s’ouvrent les chambres, et dont la paroi vitrée donne vue sur la campagne ; grand et petit salon, bibliothèque, salle à manger, cuisine, office. Il y a table d’hôte, comme dans les hôtels ; trois repas par jour, sans compter le thé, servis dans la salle à manger, ou suivant le désir des voyageurs, en particulier, dans les chambres à coucher. Les lits sont faits le soir, défaits le matin et transformés en divans pour la journée ; la nourriture, le service laissent peu à désirer. Et cependant, il faut bien l’avouer, le confortable n’y est pas ; on y est gêné, on y manque d’air et d’espace ; on n’y a pas ses coudées franches ; tout est resserré, étriqué, étroit ; il faut se faire petit pour passer par les portes ; se hisser dans son lit et en descendre est un travail de force et d’adresse, qui suppose une souplesse de reins, une agilité et une sûreté de mouvements dont on n’est pas toujours doué à un degré suffisant… Mais toutes les choses humaines, et les meilleures, n’ont-elles pas leurs imperfections ? Et le progrès n’a-t-il pas, presque toujours, ses inconvénients, quelquefois même ses dangers ? Ne critiquons donc pas trop l’Orient- Express ; si l’on est heureux d’en être descendu, on se félicite d’y être monté, la vitesse, la rapidité ont leurs avantages, et souvent des avantages que rien ne saurait replacer ; reconnaissons d’ailleurs que cette vitesse, que cette rapidité n’empêchent pas de voir les pays que l’on traverse, de jouir de leurs aspects et d’en apprécier les caractères. »


Eugène Guibout, Les Vacances d’un médecin, 1887, Constantinople - Asie Mineure - Grèce - Italie, [Paris], G. Masson, 1888, p. 13-14.

-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------« Les wagons-lits de l’Orient-Express sont loin d’être confortables, et on serait en droit de nous fourrer un quatrième voyageur dans cet étroit espace ! » « Enfin, on nous accorde de nous laisser à trois, mais je me prends à regretter nos cabines des Messageries !! »


MMPV, 1895, Impressions et souvenirs. Deux sœurs jumelles en voyage, [Lille], Société de Saint- Augustin, 1897, p. 244.


Lors de l’assemblée générale du 11 mars 1884, la CIWL, après avoir fait l’annonce de la mise en service quasi simultanée de « l’Orient Express » (5 juin 1883) et du « Calais-Nice-Rome Express (18) » (8 décembre 1883), différencie nettement la fonction des deux trains : « Le premier est un train postal et est, comme nous vous le disions tantôt, subsidié par les gouvernements des différents pays traversés. Le second est à proprement parler un train rapide de luxe qui dessert toutes les stations hivernales depuis Marseille jusqu’à Gênes, Pise et Rome. » Ce train, dont les recettes ont dépassé toutes les prévisions, est rendu bihebdomadaire dès janvier 1884 entre Paris et Nice pour répondre à la demande.


Moins attractif, le Train Express d’Orient finit cependant par s’imposer. Lors de l’assemblée générale du 21 avril 1885, la CIWL fait connaître que ce train, qui ne roule pour l’heure que deux fois par semaine, deviendra quotidien entre Paris et Budapest à partir du 1er juin (19). Et de conclure : « C’est la consécration du succès et de l’utilité de ces grands trains internationaux, qui ne tarderont pas à s’imposer sur tous les longs parcours et qui deviendront la branche la plus importante et la plus productive de notre entreprise. » Cette évolution, la CIWL l’a déjà assimilée en complétant sa raison sociale, la Compagnie internationale des wagons-lits devenant, en mars 1884, la Compagnie internationale des wagons-lits et des grands express européens.


Circulant désormais chaque jour, le Train Express d’Orient voit sa capacité d’accueil s’accroître au point de devenir accessible, à partir du 1er juin 1885, aux voyageurs de et pour toutes les gares françaises du parcours, telles celles d’Épernay, Châlons-sur-Marne, Bar-le-Duc, Toul, Nancy et Lunéville.


Un relevé des recettes du Train Express d’Orient pour 1886 s’établit comme suit : voitures-lits 498 173,69 F ; repas et bières 56 309, 20 F ; vins et liqueurs 40 289,02 F ; courrier 67 517,42 F ; messageries 362,29 F. Il est vrai que l’on consomme beaucoup à bord, trop peut-être. C’est du moins le sentiment de l’historien et théologien protestant Édouard Sayous, qui déclare au terme d’un voyage accompli en 1888 : « Je suis arrivé à Vienne par l’Orient-express, un produit très avancé de l’art de gâter le voyageur en vidant sa bourse (20). »


Nouvel élément de trafic pour le Train Express d’Orient, le service accéléré de messagerie entre la France, l’Autriche-Hongrie, la Serbie et la Roumanie a été inauguré en septembre 1886. Le Matin en a averti ses lecteurs dans son édition du 20 septembre : « Ces expéditions se feront : Entre Paris et Vienne, en 27 heures. Entre Paris et [Budapest], en 34 h. 30 m. Entre Paris et Belgrade, en 42 h. 15 m. Entre Paris et Bucarest, en 53 h. 15 m. La Compagnie se charge de la prise et de la remise à domicile, des formalités de douane, etc. »


Dans le même temps, la CIWL a complété son offre par la création de « billets circulaires ». Ces billets, « à prix très réduits et valables pendant 40 jours », offrent aux touristes anglais et français la possibilité d’effectuer, « nourris et logés en voiture », un périple entre Londres ou Paris et Constantinople via Munich, Vienne, Budapest, Bucarest et Varna, avec retour par Andrinople, Philippopoli, Sofia et Belgrade, ou vice-versa. « Nous sommes convaincus que cette combinaison tentera de nombreux voyageurs, désireux de connaître à l’avance la route encore peu explorée qui sera celle de l’avenir, aussitôt que la jonction des chemins serbes, bulgares et ottomans sera devenue un fait accompli » (Le Matin, 17 septembre 1886).


Cette jonction devient réalité en 1889 avec l’ouverture, le 1er juin 1889, de la ligne directe de Belgrade à Constantinople par Belgrade et Sofia. C’est l’aboutissement de la décision prise en 1885 de créer une branche du Train Express d’Orient dirigée depuis Budapest sur Belgrade et ses audelàs vers Constantinople. À cette date, il existait toujours une lacune ferroviaire de quelque 260 km entre Nisch (Serbie) et Philippopoli (Bulgarie). Celle-ci était couverte en trois jours par la route (21). Le premier train à emprunter le nouvel itinéraire était parti de Paris le 3 juin et était arrivé à Nisch le 5, après un trajet de près de 2 500 km effectué en 48 heures. L’importance de l’événement n’avait pas échappé au chroniqueur des Annales industrielles : « Cette dernière voie de communication, à travers la Serbie, est appelée à un avenir certain le jour où les chemins de fer bulgares et les fameux raccordements turcs auront été construits et livrés à l’exploitation. Un progrès immense aura alors été atteint ; car Paris et Constantinople se trouveront reliées par une voie ferrée qui permettra aux voyageurs d’effectuer ce trajet sans changement de voiture et sans qu’il soit nécessaire de s’embarquer. Le résultat obtenu jusqu’ici, quoique plus modeste, n’en est pas moins important. En effet, les voyageurs pour Constantinople, qui craignent la mer peuvent désormais se rendre à Nisch par l’Orient- Express qui part de Paris le mardi de chaque semaine, faire en voiture le trajet qui sépare Nisch de Tatar-Bazarjick où ils trouveront des trains pour Constantinople (22). »


Si l’ancien itinéraire par Bucarest et Varna (puis Constantza à partir de 1895) est maintenu, c’est par cette nouvelle voie, qui a cet avantage de ne plus subir de rupture de charge, que les voyageurs les plus pressés se rendent désormais aux portes de l’Asie en raison des gains de temps enregistrés entre Paris et Constantinople (3 108 km) : près de 14 heures à l’aller (de 81 h 41 à 67 h 46), de 5 heures au retour (de 76 h 49 à 72 h 10).


La Première Guerre mondiale est fatale à l’Orient-Express. Restauré en 1920, il ne circule plus désormais que dans l’ombre du nouvel Simplon-Orient-Express qui draine l’essentiel de la clientèle à destination d’Istanbul (anciennement Constantinople) via la Suisse, l’Italie et les Balkans. Mais ceci est une autre histoire.


(1)- CIWL. Assemblée générale ordinaire du 12 mars 1878.

(2)- CIWL, Assemblée générale ordinaire, 9 mars 1880.

(3)- Une description détaillée de la rame a été donnée par La Revue générale des chemins de fer : « Train d’essai de Paris à Vienne organisé par la Société internationale des wagons-lits », décembre 1882, p. 443-448.

(4)- Les détails de ce voyage sont extraits de la lettre que l’un des participants payants, « Français et homme du monde », a adressée à ses parents le 4 juin depuis San Francisco, lettre reproduite par Le Figaro.

(5)- Giurgiu / Jerkoki, point terminus sur le Danube, ville portuaire de Valachie reliée par le chemin de fer à Bucarest en 1869.

(6)- Nom officiel jusqu’en 1891, date à laquelle le Train Express d’Orient devient officiellement l’Orient-Express (appellation qui apparaît régulièrement dans la presse dès 1883, voir encadré p. 15).

(7)- Si le traité d’origine porte le 15 mars 1883 comme jour de la signature du document par G. Nagelmackers, l’annexe à ce traité (rédigée en 1885), donne le 15 mai 1883 comme jour du paraphe, ce qui est plus vraisemblable.

(8)- « C’est là que je remarque une chose à laquelle je n’avais point fait attention encore ; notre train possède trois freins, l’un à air comprimé, qui sert en France ; l’autre à main, qui sert en Allemagne (ce qui m’a étonné dans un pays qui veut, en toutes choses, être supérieur aux autres nations) ; le troisième, à vide, dont on fait usage à partir de Simbach, frontière autrichienne. », J. Tréfeu, Le Gaulois, 18 octobre 1883.

(9)- Voir Jean des Cars et Jean-Paul Caracalla, L’Orient-Express. Un siècle d’aventures ferroviaires, Denoël, 1984, p. 20.

(10)- Georges Cochery, représentant officieux du gouvernement français, faisait figure de principal invité. Il devait profiter du voyage inaugural pour se rendre, accompagné de son fils, à l’Exposition d’électricité qui se tenait à Vienne.

(11)- En vérité, deux femmes monteront à bord du train à Budapest : l’épouse de Von Scala, inspecteur de l’Exploitation des Chemins de fer de l’État autrichiens, et sa soeur. Au retour, elles seront imitées par plusieurs « dames » autorisées à monter à Vienne

(12)- H. de Blowitz, Une course à Constantinople, Paris, Plon, 1884 ; « G. Boyer, « L’Orient à toute vapeur », Le Figaro du 20 octobre 1883 ; Éd. About, « De Pontoise à Stamboul. Féerie authentique », Le XIXe Siècle des 21, 26 et 31 octobre 1883, 8, 11, 13 et 18 novembre 1883 ; Edmond About, De Pontoise à Stamboul, Hachette, 1884 ; J. Tréfeu, « Par l’Orient-Express. De Paris à Bucharest », Le Gaulois des 18 et 22 octobre 1883.

(13)- Ouverte en 1866, la ligne de Routschouk à Varna a été rétrocédée en 1889 au gouvernement bulgare par la Compagnie d’exploitation des chemins de fer orientaux.

(14)- Avant l’apparition des premiers wagons-restaurant, les marches des trains express et rapides prévoyaient dans quelques gares intermédiaires des « arrêts-buff et » suffi samment longs pour permettre aux voyageurs de se restaurer.

(15)- Al. Laplaiche, « L’Orient-Express », La Nature, 7 juin 1884, p. 5-8.

(16)- Les frais d’exploitation du Train Express d’Orient étaient très élevés. Un document se rapportant à l’année 1889 fait état d’une dépense de 100 220 F, loin devant celle du Sud Express arrêtée à 48 099 F. Au nombre des dépenses : le chauffage, l’éclairage, le blanchissage, la fourniture d’eau, les indemnités du personnel, les frais de douane et de police, de nettoyage, etc.

(17)- Convention du 2 juin 1883. Paul Jaccottey, Traité de législation et d’exploitation postales, P. Dupont (Paris), 1891, p. 519.

(18)- Le premier contrat passé entre la CIWL et le PLM remonte à 1877 (introduction trois fois par jour à partir du 20 février et quotidiennement à partir du 15 juin de deux voitures-lits entre Paris et Marseille aux trains 3 et 4).

(19)- Parti de Paris à 7 h 30 le soir, le Train Express d’Orient rejoint Vienne le lendemain à 10 h 30 le soir (soit un gain de sept heures sur les rapides ordinaires) et Bucarest le surlendemain à 5 h 37 le matin.

(20)- Edouard Sayous, « Un voyage à Budapest », Bibliothèque universitaire et Revue suisse, t. XLI (troisième période), janvier-mars 1889, n° 121-123, p. 560-575.

(21)- La CIWL inaugure à partir de 1886 un service spécial « de voitures confortables pour deux personnes attelées de trois chevaux » entre Nisch et Tatar Bazardjick, afin d’offrir une alternative aux voyageurs de la ligne classique via Bucarest et Varna, menacés d’une quarantaine sanitaire de cinq jours pour cause d’épidémie (Le Temps, 20 août 1886).

(22)- Annales industrielles, 14 juin 1885.

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